L’évènement a été organisé le 1er octobre 2020. L’objectif de cette table ronde était de consacrer un véritable temps de parole aux « juges d’un jour » que sont nos jurés d’assises.
Nous avons donc eu le plaisir de les compter nombreux à cet évènement, entourés de la présence attentive et bienveillante des professionnels du monde de la justice.
La période de crise sanitaire n’a pas entaché la convivialité que nous souhaitions donner à la soirée, c’est donc autour d’un plateau repas individuel et d’un verre de bienvenue que s’est ouverte cette table ronde.
La manifestation a été introduite par Monsieur le Premier président, Michel ALLAIX, qui a souhaité partager ses réflexions autour de « l’acte de juger », mettant en valeur l’importance de l’avis de « nos juges d’un jour », dans sa mise en oeuvre.
Il a rappelé qu’un retour d’expérience par les juré participait à la démocratie de notre société judiciaire, alors que la justice d’aujourd’hui recevait des réponses souvent managériales à ces problématiques nouvelles. La qualité de la justice est en question, quel est donc le prix à payer pour l’obtenir. Ainsi, la cour d’assises, justice « de luxe », doit-elle être conservée ? Quelle place doit-on accorder à la procédure orale à l’aune de la dématérialisation des procédures, et d’accélération de la décision ? Quelle est le rôle de l’audience ?
C’est autour de ces questions que le débat s’est ouvert, chacun des professionnels, président de la cour d’assises, avocats, médecin légiste, procureur de la république et présidents a fait part de son point de vue, avant de laisser une large place à nos invités « d’un soir », les jurés, au centre de l’évènement.
La soirée s’est poursuivie par la projection du film-documentaire « A vous de juger » réalisé par Mme Brigitte CHEVET, ancienne magistrat, a permis de donner le ton de la soirée.
Puis Madame Claire BOUTELOUP, médiatrice et facilitatrice, a ainsi permis de faire circuler la parole parmi les jurés présents, qui se sont reconnus dans les témoignages recueillis dans le documentaire.
Ainsi, entre sentiment de culpabilité dans le prononcé de la peine, brutalité du dossier pénal et manque de préparation, les jurés ont pu témoigner de leur expérience difficile mais au combien humainement intéressante de la fonction de jurés. « Mon regard sur la justice ne sera plus jamais pareil » disait un juré, « nous avons eu la chance d’avoir un Président de Cour d’Assises qui a heureusement pris le temps de nous expliquer » soulignait un autre juré, heureusement, tout n’était pas aussi sombre que le dossier qu’ils avaient à juger.
« Les questions que vous vous êtes posées, les inquiétudes et les doutes que vous avez dû affronter, nous y sommes confrontés nous aussi » partageait Madame la Présidente du Tribunal Judiciaire de VALENCE.
Malgré toutes ces difficultés, c’est unanimement qu’à la question de savoir s’il était opportun de laisser la place à une Cour Criminelle, les jurés ont répondu « que la justice ne serait plus la justice du peuple », et l’un d’entre eux de conclure « si c’était à refaire, je le ferai sans hésitation, être juré a été une expérience incroyable ».
Enfin, il a été exposé par monsieur le président de la cour d’assises de l’Ardèche, Roger ARATA, fort de son expérience, que le délibéré doit permettre à échanger sur la peine, en gardant à l’esprit qu’en droit français, la peine doit servir la réinsertion et non l’exclusion.
Alors que maitre VIGNAL a plaidé que les jurés se jettent « dans le vide sans parachute », que les récusations sont très certainement mal ressenties mais qu’elles ne sont pas basées sur « une récusation personnelle » mais liée à une profession, un age, un juré trop décidé, Cécile DEPRADE, procureur de la république de Privas a tenu à nous rappeler que derrière l’avocat général se cache un homme ou une femme, à qui il appartient, en sa qualité de professionnel, d’expliquer l’infraction, et la peine proposée, dans le cadre de l’application de la loi.
En conclusion, il a été rappelé par monsieur le Premier président, relevant 5 éléments de synthèse, la brutalité de la fonction de juré, la belle expérience que cette fonction « de juger », et d’être « juge d’un jour, » ,l’importance du collectif et de la réflexion à plusieurs, quotidien de nos juges professionnelles, et enfin la relativité de la justice « la moins mauvaise », et la nécessité d’une mise à distance.
Ainsi, la soirée si elle a été enrichissante pour les jurés, qui ont découvert derrière les professionnels avertis, des hommes et des femmes de justice, dont les préoccupations ne sont pas si éloignées des leurs, elle a aussi rappelé aux professionnels la nécessité d’un accueil de qualité, mais aussi l’importance du collectif et la richesse du délibéré en commun.
L’on peut se demander si ces échanges n’ont pas participé à les réconcilier avec la justice, et l’idée qu’ils s’en font ?